PEUT-ON ENGAGER LA RESPONSABILITE D'UN HOPITAL POUR AVOIR REALISE UNE TRANSFUSION SANGUINE NON CONSENTIE ?
Cour administrative d'appel de Bordeaux, 20 octobre 2022, n°20BX03081
Quels étaient les faits d'espèce ?
Une patiente, témoin de Jéhovah, avait été admise au sein d'un hôpital afin de subir une intervention. Elle avait informé l'équipe médicale de son refus de recevoir des transfusions sanguines. L'intervention ayant fait l'objet de complications, les médecins ont tenté des techniques alternatives qui ont échouées. Malgré la réitération du refus de la patiente, les médecins ont décidé de réaliser plusieurs transfusions sanguines.
Après avoir reçu la communication de son dossier médicale un an après les faits, la patiente a saisi le tribunal administratif afin d'obtenir indemnisation de son préjudice moral sur le fondement de la faute de l'hôpital et du manquement au devoir d'information. Le tribunal a accepté de condamner l'hôpital au versement de la somme de 1 000 euros en raison du manquement au devoir d'information sur le risque hémorragique lié à l'intervention médicale. Elle a alors interjeté appel.
Les patients disposent-ils de droits ?
OUI - Dans un premier temps, la cour administrative d'appel de Bordeaux rappelle que les patients et les personnes malades disposent de plusieurs droits :
- le droit que tous moyens soient mise en place pour protéger sa santé (article L. 1110-1 du code de la santé publique) ;
- le droit au respect de sa dignité (article L. 1110-2 du code de la santé publique) ;
- le droit de recevoir les traitements les plus adaptés compte tenu de son état de santé (article L. 1110-5 du code de la santé publique).
Peut-on refuser des traitements médicaux ?
Doit-on obtenir le consentement d'un patient avant un traitement médical ?
OUI - Ensuite, les juges administratifs rappellent les dispositions de l'article L. 1111-4 du code de la santé publique selon lesquelles une personne malade prend les décisions relatives à sa santé, et a le droit de refuser de recevoir un traitement. Le médecin est dans l'obligation de respecter le choix du patient, après l'avoir informé des conséquences dudit choix.
La pratique de tout acte médical doit recueillir au préalable le consentement du patient, libre et éclairé. En cas de danger vital, le patient doit réitérer son refus
Peut-on émettre un choix à l'avance, dans l'hypothèse où l'on ne pourrait pas exprimer sa volonté ultérieurement ?
OUI - En effet, les articles L. 1111-11 et R. 1111-17 du code de la santé publique prévoient la possibilité pour une personne majeure de rédiger des directives anticipées afin de préciser son consentement ou son refus de recevoir un traitement particulier. Ici encore, le médecin est dans l'obligation de respecter le choix du patient.
Deux exceptions existent :
- en cas d'urgence vitale ;
- si les directives sont inappropriées face à la situation.
Il faut cependant respecter une procédure collégiale.
En l'espèce, la patiente était témoin de Jéhovah et avait communiqué à l'équipe médicale des instructions précisant qu'elle refusait toute transfusion sanguine, mais acceptait des techniques alternatives. A la suite de l'incident lors de l'opération, l'équipe médicale avait tenté d'utiliser d'autres procédés. En raison de l'échec de ses techniques alternatives, la patiente a fait l'objet d'une transfusion Le juge administratif considère que le pronostic vital de la patiente était engagé, et que son état ne permettait pas aux médecins de s'assurer qu'elle réitérait son refus. Par conséquent, ces transfusions ne pouvaient être considérées comme fautives.
Toutefois, ultérieurement à cet incident, les médecins ont indiqué à la patiente qu'une transfusion était nécessaire en raison de son anémie, ce qu'elle a refusé à une nouvelle reprise. Les médecins ont toutefois décidé de procéder à cette intervention, contre son gré, en précédant à sa sédation. Dans ces conditions, la cour administrative d'appel de Bordeaux a considéré que cette troisième transfusion était fautive, si bien que l'hôpital a été condamné à lui verser 4 000 euros au titre de son préjudice moral.
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