PEUT-ON CONTESTER EN CASSATION UNE RÉGULARISATION INSUFFISANTE ?
Conseil d'Etat 30 avril 2025, "Société Prosper et M.B", n°493959
En matière d’urbanisme, il est fréquent qu’un permis de construire soit annulé ou suspendu en raison d’une irrégularité affectant le projet, telle qu’une violation du règlement du plan local d’urbanisme.
Toutefois, la loi permet à l’autorité administrative de régulariser cette illégalité, notamment via les dispositions de l’article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme, qui autorise le juge à suspendre temporairement sa décision pour laisser à la commune le soin de corriger le permis litigieux.
Mais que se passe-t-il si cette régularisation est imparfaite ou incomplète ? Les requérants peuvent-ils encore la contester, et jusqu’à quel point ? La question se pose notamment lorsqu’ils ne formulent aucune remarque à ce sujet devant le tribunal administratif mais souhaitent soulever ce défaut en cassation. Dans une décision rendue le 30 avril 2025 (CE, n° 483441), le Conseil d’État répond clairement à cette interrogation, dans une solution qui renforce les droits des justiciables.
La régularisation d’un permis de construire est-elle toujours définitive ?
Non, car la régularisation d’un permis d’urbanisme ne suffit pas à clore automatiquement le débat.
L’article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme permet au juge de surseoir à statuer pour laisser à l’administration la possibilité de régulariser un permis entaché d’illégalité. Mais cette procédure n’exonère pas le juge de vérifier ensuite, d’office, si la régularisation est complète et conforme.
Dans une décision rendue le 30 avril 2025 (CE, 30 avril 2025, n° 483441), le Conseil d’État a jugé que l’absence d’observation des requérants devant le tribunal administratif sur la régularisation apportée ne les empêchait pas de soulever ce point devant le Conseil d’État. Le juge de cassation a estimé qu’il ne s’agissait pas d’un moyen nouveau, car le tribunal devait vérifier de lui-même si la régularisation avait pleinement corrigé le vice identifié. Cela renforce les droits des citoyens face à des régularisations incomplètes.
Peut-on soulever la régularisation incomplète pour la première fois en cassation ?
Oui. Le Conseil d’État a considéré que l'incomplétude d'une mesure de régularisation ne constitue pas un moyen nouveau en cassation, lorsque le juge de première instance avait l’obligation de contrôler si le vice entachant l’autorisation initiale avait bien été corrigé.
Dans cette affaire, une commune avait délivré un permis de régularisation le 5 octobre 2023, après que le tribunal administratif compétent eut sursis à statuer en février 2023. Ce permis avait été transmis aux parties, mais les requérants n’avaient pas présenté d’observations sur sa validité. Le 4 mars 2024, le tribunal a rejeté la requête initiale. Toutefois, en cassation, les requérants ont pu légalement contester le caractère insuffisant de la régularisation, le Conseil d’État estimant que le juge devait l’examiner indépendamment des arguments des parties.
Cette solution protège les justiciables face à des décisions entachées d’erreurs non corrigées, même si ces erreurs ne sont explicitement dénoncées qu’en cassation.
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