QUELLES SONT LES CONSEQUENCES DE L'ANNULATION DU PLUI-H DE TOULOUSE ?
DANS QUEL CONTEXTE INTERVIENT LA DECISION D’ANNULATION DU PLUI-H ?
L’adoption et le principe du PLUi-H de Toulouse Métropole
L’assemblée délibérante de Toulouse Métropole a délibéré le 9 avril 2015 sur la prescription de l’élaboration d’un plan local d’urbanisme intercommunal et de l’habitat devant se substituer aux PLU des 37 communes membres. Après une longue procédure d’élaboration, Toulouse métropole a, par une délibération du 11 avril 2019, approuvé le PLUi-H. L’objectif premier du PLUi-H était une stratégie de « densité modérée » pour la métropole, ce qui consiste à limiter la consommation du foncier et reconstruire la ville sur elle-même. Mais par un jugement en date du 30 mars 2021, le tribunal administratif de Toulouse a annulé la délibération du 11 avril 2019.
Une affaire hors normes
Cette affaire comptait 41 requêtes dirigées contre la délibération d’approbation du 11 avril 2019. Examinées lors de l’audience du 10 mars 2021, le rapporteur public a présenté, pendant 5 heures, ses conclusions favorables à l’annulation globale. Les juges ont suivi cette recommandation en annulant le PLUi-H et en accueillant 11 des 41 requêtes. Le juge administratif a en effet considéré que le PLUi-H était trop consommateur d’espaces naturels et agricoles.
QUELS MOTIFS LE JUGE A-T-IL RETENUS POUR PRONONCER L’ANNULATION DU PLUI-H ?
L’insuffisance du rapport de présentation
Le moyen retenu pour l’annulation totale du document d’urbanisme repose sur un vice tiré de l’insuffisance du rapport de présentation. Le PLU à la différence des anciens POS est un document programmatique, il doit donc prévoir des objectifs de consommation foncière sur 10 ans. Le but de la législation est bien de limiter au maximum l’étalement urbain.
Plus précisément, la décision sanctionne la « méconnaissance de certaines dispositions des articles L151.4 et L.151-5 du code de l’urbanisme ». Le premier article concerne le rapport de présentation qui doit contenir une analyse de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestier au cours des dix années précédant l’approbation du PLU afin de justifier les objectifs chiffrés de modération de la consommation de l’espace.
En l'espèce, la métropole a dû procéder à une extrapolation de cette consommation pour la période 2015-2018, mais le Tribunal a considéré que cette extrapolation était surestimée. Ainsi, le rapport de présentation affichait des objectifs de réduction de la consommation foncière alors que, sur la base de cette analyse, les objectifs fixés pour les dix années à venir étaient au mieux une stagnation, au pire une augmentation de cette consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers, par rapport à la décennie antérieure. Le juge a ainsi considéré le PLUi-H comme contraire à la loi en ce qu’il ne contribuait pas assez à la lutte contre l’étalement urbain.
Autre motif d’annulation, le juge censure les orientations d’aménagement de programmation relatives à deux projets urbains de la métropole : Parc Boyer et La Ramée-Marquisat.
Concernant les requêtes qui n’ont pas été accueillies par le juge, le jugement n’est pas motivé sur les motifs de leur rejet. Cela pose problème au niveau de la régularité du jugement et pourrait constituer un moyen d’annulation en appel. Néanmoins, l’intérêt pour faire appel s’apprécie au regard du dispositif et non des motifs et l’ensemble des requérants obtiennent satisfaction dans le dispositif. Ce silence du tribunal administratif de Toulouse peut alors être entendu comme un moyen de ne pas se prononcer sur le parti pris d’aménagement par Toulouse Métropole.
Une difficulté résolue par la loi ELAN
Avant la loi Elan du 23 novembre 2018, il fallait prendre en compte la consommation foncière des 10 dernières années avant la date d’approbation du PLU. Dans la mesure où l’élaboration du PLU s’étend sur plusieurs années, cela supposait qu’au moment de l’élaboration de ces objectifs, l’administration extrapole la consommation foncière pour la période entre le lancement de l’élaboration du document d’urbanisme et son approbation.
Depuis la loi ELAN, l’analyse de la consommation d’espaces naturels concerne les 10 dernières années avant le lancement du projet et non plus avant l’approbation. Cette réforme législative évite désormais à l’administration d’extrapoler, c’est pourquoi la difficulté de l’espèce ne devrait pas se reproduire.
QUELLES DIFFICULTES IMPLIQUE LA DECISION D’ANNULATION ?
La possibilité d’une modulation dans le temps de l’annulation
Si l’annulation d’un document d’urbanisme n’entraîne pas l’annulation des autorisations d’urbanisme délivrées sur ce fondement, ce jugement soulève tout de même des difficultés. La conséquence première de cette annulation est le retour au PLU ou POS de chaque commune puisque le jugement avant dire droit évacue la possibilité de régularisation. La difficulté est que cela modifiera les règles de construction et d’habitat de certains terrains. Alors, les projets pour lesquels les permis n’ont pas encore été délivrés devraient, en principe, s’adapter pour se conformer à l’ancienne réglementation remise en vigueur.
A cet égard, il est possible que le tribunal administratif laisse un temps suffisant à l’administration pour instruire les projets en cours à travers une modulation dans le temps de l’annulation. Sur ce point, le jugement avant dire droit met en œuvre un équilibre juridique : s’il suit les conclusions du rapporteur public en annulant le PLUi-H, le juge décide de surseoir à statuer sur la date d’effet de cette annulation. Cette décision permet aux parties de débattre et trouver un accord sur les effets dans le temps de cette annulation. A ce titre, une nouvelle audience interviendra le 29 avril, à l’issue de laquelle une nouvelle décision sera rendue concernant la modulation dans le temps de l’annulation.
La durée potentiellement retenue par le juge administratif
L’enjeu est de savoir quelles modalités de modulation de l’annulation le juge administratif retiendra. Il pourra décider que l’annulation interviendra deux mois après sa décision, pour s’accorder avec le délai d’instruction d’un permis. Il pourra également tenir compte des majorations de délai d’instruction, pour les zones protégées notamment, en retenant une prise d’effet de l’annulation que 6 mois après sa décision.
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