LA COMPENSATION DES OBLIGATIONS DE SERVICE PUBLIC DOIT-ELLE COUVRIR TOUTE AUGMENTATION DES COÛTS ?
Cour de justice de l'Union européenne, 23 décembre 2023, Aff. C-421/22
Les autorités nationales qui confient à une entreprise l'exécution d'un service public de transport de voyageurs doivent-elles compenser les coûts occasionnés par l'exécution des obligations de service public ?
OUI - La Cour rappelle le principe selon lequel "conformément au second alinéa de l'article 1er, paragraphe 1 du règlement no 1370/2007, les conditions dans lesquelles les autorités nationales compétentes, lorsqu’elles imposent des obligations de service public ou qu’elles en confient l’exécution à une entreprise, octroient une compensation aux opérateurs de service public en contrepartie des coûts supportés et/ou leur accordent des droits exclusifs en contrepartie de l’exécution d’obligations de service public."
En l'espèce, le litige ayant donné lieu à une question préjudicielle posée à la Cour de justice de l'Union européenne porte sur la conclusion, à l’issue d’une procédure d’appel d’offres ouverte, transparente et non discriminatoire, d’un contrat de service public aux fins de la fourniture de prestations de service de transport de voyageurs par autobus en Lettonie.
Il incombe à la Cour de déterminer si le règlement européen précité "doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à un régime de compensation qui, dans le cadre d’un marché public de services et à l’issue d’une procédure d’appel d’offres ouverte, transparente et non discriminatoire, n’impose pas aux autorités nationales compétentes d’octroyer à un prestataire de services de transport de voyageurs soumis à des obligations de service public une compensation intégrale couvrant, au moyen d’une indexation régulière, toute augmentation des coûts liés à la gestion et à l’exploitation de ce service qui échappent à son contrôle".
La compensation des coûts liés aux obligations de service public doit-elle couvrir, au moyen d'une indexation régulière, toute augmentation de ces coûts ?
NON - Afin de répondre à cette question, la Cour interprète les dispositions de l’article 4 du règlement no 1370/2007 qui prévoit les exigences et modalités d’une telle compensation.
Elle précise, dans un premier temps, qu'il en ressort que les autorités nationales, à qui il incombe de fixer les paramètres de calcul de la compensation, jouissent, dans le cadre d’un contrat de service public, d’une marge d’appréciation pour concevoir le mécanisme d’une telle compensation.
Elle estime ensuite qu'elles "ne sont pas tenues de compenser tous les coûts, mais peuvent transférer au prestataire de ce service public les risques associés à l’évolution de certains de ceux-ci, sans qu’il importe que ce prestataire puisse ou non, à l’instar du coût de l’énergie ou de certains coûts sociaux, maîtriser pleinement leur évolution, dès lors que celle-ci relève de circonstances extérieures audit prestataire".
La Cour analyse en suite l'objectif poursuivi par le mécanisme de compensation. Elle souligne ainsi que "tout régime de compensation doit viser non seulement à éviter une surcompensation des coûts, mais encore à favoriser une plus grande efficacité dans le chef du prestataire d’un service public de transport".
Enfin, elle analyse les modalités de la compensation au regard de ces objectifs : "Or, un régime de compensation qui garantit, en toutes circonstances, la couverture automatique de tous les coûts liés à l’exécution d’un contrat de service public ne comporte pas une telle incitation à une plus grande efficacité, dès lors que le prestataire en cause n’est pas amené à limiter ses coûts".
"En revanche, un régime de compensation qui, en l’absence d’indexation régulière, ne couvre pas, de manière automatique, l’intégralité de ces coûts, mais aboutit à transférer certains risques au prestataire du service public, est susceptible de contribuer à la réalisation d’un tel objectif".
Ce qui lui permet de répondre à la question posée : "Il résulte, dès lors, de tout ce qui précède que les autorités nationales compétentes ne sont pas tenues, dans le cadre d’une procédure de mise en concurrence, de compenser automatiquement, au moyen d’une indexation régulière, tous les coûts supportés par le prestataire d’un service de transport liés à l’exécution d’un contrat de service public, qu’ils soient ou non sous son contrôle, afin que ce contrat lui procure une compensation appropriée".
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