QUELLES SONT LES CONDITIONS POUR L'INDEMNISATION D'UN PREJUDICE D'ANXIETE ?
Tribunal administratif de Melun, 20 avril 2023, n° 20003302.
Quels étaient les faits en l'espèce ?
Au sein de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP), une substance chimique nommée formaldéhyde a été accidentellement déversée dans un laboratoire anatomo-cytho-pathologie, le 24 mai 2017. L'accident a touché les locaux de la direction Achat centraux hôteliers alimentaires et technologiques (ACHAT) dans lequel travaille un cadre infirmier titulaire. Compte tenu de l'exposition à la substance cancérigène qu'est le formaldéhyde, cet agent a formulé une réclamation devant son administration pour obtenir réparation pour le préjudice d'anxiété, conséquemment à la crainte de développer une pathologie liée à l'incident.
Après une décision implicite puis explicite de rejet venant de l'AP-HP, le cadre a saisi le tribunal administratif de Melun qui a rendu un jugement en date du 20 avril 2023, n°2000302.
Le préjudice d'anxiété invoqué doit-il être en lien avec l'existence d'un risque ?
OUI - Pour être susceptible de recevoir une indemnisation, le requérant doit démontrer la présence d'un lien direct et certain entre le préjudice d'anxiété et l'existence objective d'un risque grave et probable pour la santé. Sur le fondement de cette règle jurisprudentielle, le tribunal administratif a constaté que le cadre infirmier titulaire ne présentait pas suffisamment d'éléments personnels et circonstanciés qui prouvent un sentiment d'anxiété à la suite d'une exposition prolongée au formaldéhyde.
En premier lieu, les études par le centre international de recherche sur le cancer présentées par le requérant, ont été menées sur des patients atteints du cancer et exposés pendant plusieurs années à la substance. Etant donné que l'exposition au formaldéhyde, dans le cas d'espèce, était de courte durée, la différence de situation ne permettait pas d'établir un lien direct et certain entre l'anxiété alléguée et l'existence d'un risque grave et probable pour la santé.
En deuxième lieu, bien que les deux certificats médicaux communiqués par l'agent, faisaient état de "problèmes respiratoires" et de "plaques rouges irritantes sur le thorax de la nuque", ces symptômes ne suffisaient pas pour constituer un lien direct et certain, pas plus qu'ils révèlaient une pathologie due à l'exposition dangereuse au formaldéhyde. De ce fait, selon la perspective du tribunal administratif, aucune indemnisation n'était due à l'agent, faute de préjudice d'anxiété en lien direct et certain avec un risque grave et probable.
Les mesures de l'administration sont-elles prises en compte dans l'appréciation du lien direct et certain ?
OUI - Le juge administratif a constaté que la médecine du travail de l'AP-HP avait mis en place un suivi médical renforcé pour les agents exposés du local ACHAT, à la suite de l'accident. En outre, des pompiers sont intervenus pour nettoyer les lieux et réaliser des mesures mettant en évidence des résultats inférieurs aux valeurs limites d'exposition professionnelle (VLEP), soit 0,074 miligrammes par mètre cube avant la décontamination.
Ainsi, comme l'administration a entrepris des démarches pour protéger les agents et sécuriser les lieux afin de limiter les conséquences de cet accident, le juge administratif a pris en compte ces éléments factuels pour renforcer son argumentation tenant à l'absence de lien direct et certain entre le préjudice d'anxiété et la présence d'un risque grave et probable pour la santé.
Devant ces considérations, la requête du requérant a été rejetée.
Retrouvez nos autres actualités sur les thèmes du Droit de la fonction publique et du contentieux administratif :
Dans le cadre du contentieux en matière de Droit de la fonction publique et de contentieux administratif, le Cabinet Lapuelle est disponible pour vous accompagner.
Vous pouvez également trouver sur le lien suivant, de nombreux modèles de courriers, notes juridiques et guides en matière de droit public général, qui sont à votre disposition sur le site Lapuelle Juridique.
Pour toute autre question, vous pouvez contacter votre cabinet juridique ou prendre rendez-vous.
Maître Clémence LAPUELLE - 38 rue Alsace-Lorraine - 31000 TOULOUSE - Tél. : 05 61 38 27 17 - Mail : lapuelle@cabinetlapuelle.com
Nos documents juridiques associés à cette actualité
40.00 €
- décembre 2024
- novembre 2024