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ESCROQUERIE : L'ADMINISTRATION NÉGLIGENTE PEUT-ELLE INVOQUER LA FAUTE DU CO-CONTRACTANT ?

Le 02 avril 2024
ESCROQUERIE : L'ADMINISTRATION NÉGLIGENTE PEUT-ELLE INVOQUER LA FAUTE DU CO-CONTRACTANT ?
L'administration victime d'une escroquerie au faux changement de coordonnées bancaires est tenue de renouveler le paiement au véritable créancier et ne peut invoquer la faute initiale de son co-contractant dès lors qu'elle a elle-même été négligente.

Cour administrative d'appel de Douai, 26 mars 2024, SAS Griffiths Duteil Associés, n°22DA01355

L'administration, victime d'escroquerie, doit-elle répéter son paiement au co-contractant ?

OUI - En l'espèce, l'Office public de l'habitat du département de la Seine-Maritime (Habitat76) avait attribué à la société Brunet l'exécution d'un lot de marché de travaux pour un montant de 312 700 euros HT.

Victime d’une escroquerie, Habitat-76 a versé, au titre du règlement de la situation de travaux n° 1, la somme de 58 729,99 euros TTC sur un compte bancaire n'appartenant pas à la société contractante. La société Brunet a contesté le décompte général notifié par Habitat 76, sollicitant le paiement de la somme de 57 288,96 euros TTC, correspondant à la situation de travaux n° 1.

Habitat-76 a rejeté cette réclamation. Saisi de ce litige, le tribunal administratif de Rouen a condamné Habitat-76 à verser à la société Brunet la somme de 57 288,96 euros TTC.

Saisie à son tour, la cour administrative d’appel de Douai affirme que :

« d'une part, aux termes de l'article 1342-3 du code civil : " Le paiement fait de bonne foi à un créancier apparent est valable ".

D'autre part, il appartient à une personne publique de procéder au paiement des sommes dues en exécution d'un contrat public en application des stipulations contractuelles, ce qui implique, le cas échéant, dans le cas d'une fraude résidant dans l'usurpation de l'identité du cocontractant et ayant pour conséquence le détournement des paiements, que ces paiements soient renouvelés entre les mains du véritable créancier ».

Pour se libérer de ce paiement à renouveler, l'administration invoque la faute par laquelle la société contractante a permis l'escroquerie comme constituant un manquement à ses obligations contractuelles.

L'administration négligente peut-elle invoquer la faute initiale de son co-contractant ?

NON - Pour déterminer si une faute peut être imputée à la société contractante, le juge relève les circonstances de fait de l'affaire.

La fraude en question était une escroquerie au faux ordre de virement, qui nécessitait pour l'escroc de se faire passer pour la société contractante auprès de l'administration afin de lui communiquer de fausses coordonnées bancaires. Ceci a été rendu possible par le fait que la société Brunet, contactée par l'escroc se faisant passer pour l'administration, lui a communiqué des informations relative au marché de travaux qui ont permis à l'auteur de l'escroquerie d'usurper l'identité de la société auprès de l'administration.

Habitat 76 avance que cette circonstance constitue une faute de la part de la société qui l'exonère du renouvellement du paiement.

La cour administrative d'appel considère en revanche que c'est la négligence de l'administration qui a permis l'escroquerie et justifie qu'elle supporte le renouvellement du paiement auprès du véritable créancier.

En effet, le juge souligne que Habitat 76 n'a pas apporté les diligences nécessaires dans son processus de paiement.

En effet, les échanges entre l'administration et l'auteur de l'escroquerie qui a communiqué des coordonnées bancaires différentes, prétextant que la société en avait changé, présentaient de nombreuses incohérences tenant notamment aux adresses email différentes de celles des interlocuteurs habituels, l'absence de signature sur les documents communiqués ainsi que les informations attachées au compte bancaire.

La cour estime que, compte tenu de ces incohérences, l'administration "n'a pu légitimement croire se trouver en présence du véritable créancier" et aurait du effectuer des vérifications complémentaires.

Dès lors, "La circonstance que l'escroquerie présumée ait été rendue possible par la communication préalable par la société Brunet de factures est à cet égard sans incidence et ne peut caractériser un manquement à ses obligations contractuelles. Par suite, le paiement effectué le 5 septembre 2018 par Habitat 76 à la société Sycam n'a pas été fait à un créancier apparent et n'a donc pas libéré Habitat 76 de sa dette contractuelle à l'égard de la société Brunet".

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